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à la mimique de sa sensibilité ; et ses impressions, ses désirs, ses demandes, les secrets de sa secrète petite existence étouffée, allaient à sa mère en gestes attoucheurs et caressants, remontant le long de son bras, vers son cou, avec de petits serrements pressés, une espèce de pianotage, errant et expressif, promené sur elle.

— Parle donc, mon paresseux chéri… — lui répétait sa mère ; mais elle avait presque aussitôt la voix coupée par la bouche de l’enfant sur la sienne ; et elle se remettait à battre les touches, mélancoliquement.

Pierre-Charles était né d’une couche violente, d’une couche où les fers l’avaient tiré à la vie, et où son délicat petit crâne avait été froissé et comprimé par l’instrument brutal. À l’âge où les enfants parlent, et où les mères attendent, sa malheureuse mère avait eu l’imprévue douleur de ne point entendre la parole des autres enfants monter aux lèvres de cette petite figure d’intelligence : celle de son fils était si embrouillée, si difficile, si peu formulée et