Page:Goncourt - Les Frères Zemganno, 1879.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sante. La dernière bouteille qu’il gardait, le jeu seul de son biceps la couchait à plat, la relevait, la projetait en l’air, d’où elle venait se ficher par le trou du goulot au bout de son doigt.

Il avait surtout une manière charmante, et qui n’appartenait qu’à lui, de s’envoyer et de se renvoyer horizontalement d’une main à l’autre, les bras étendus, des boules de cuivre qui, devant sa poitrine, faisaient l’illusion d’un écheveau d’or en train de se dévider.

Gianni était un jongleur de première force, ses mains étaient douées d’un toucher de caresse et d’enveloppement auquel semblent adhérer les surfaces lisses, de ce toucher qu’on dirait avoir des ventouses au bout des doigts. C’était un amusant et prestigieux spectacle que celui de ce jeune homme prenant une assiette, et sous les adresses nerveuses de tout son corps penché sur elle, et sous ces sourires