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quand ils réfléchissent, il vient à tout moment à leurs réflexions, l’appréhension que cette force adroite dont ils vivent, peut être tout à coup supprimée par une maladie, un rhumatisme, un rien de dérangé dans la machine physique. Et ils pensent encore et souvent — c’est leur idée fixe — que cette jeunesse de leurs nerfs et de leurs muscles aura un terme, et que, bien longtemps avant qu’ils ne meurent, la profession exercée par eux, leur corps vieilli se refusera à la remplir. Puis enfin, il y a parmi eux, et ils sont nombreux, les démolis, ceux qui ont fait dans leur carrière, deux ou trois chutes, des chutes parmi lesquelles il y en a eu peut-être une, qui les a tenus au lit onze mois ; alors, ces hommes, sous l’apparence complète du rétablissement, demeurent selon leur expression « des démolis » et ont besoin maintenant, pour l’accomplissement de leurs tours, d’un effort qui les tue et les rend tout chagrins.

En ce moment, entrait dans le café, un