Page:Goncourt - La Fille Élisa, Charpentier, 1877.djvu/71

Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’elles prenaient à courir, à jouer, effaçait en elles l’animalité impudique, rapportait à leurs gestes de la chasteté, rajustait sur leurs corps gaminants une jeune pudeur. Dans le jardin, ces femmes ne semblaient plus guère des prostituées, et les hommes, sans savoir pourquoi, se sentaient plus de retenue avec elles.

Le verger, avec de la grande herbe jusqu’à mi-jambes, et çà et là dans l’herbe, des carrés de légumes pour la consommation de la maisonnée, laissait passer, par endroits, les vestiges d’un ancien parc dessiné par un Lenôtre de province. Tout au fond, ― le long d’une ruelle, la sente du Pinchinat, séparant le clos de grandes chènevières, d’où se levaient, dans le chaud de l’été, des senteurs capiteuses et troublantes, ― il restait encore debout le débris, plusieurs fois foudroyé, d’un labyrinthe planté de buis centenaires. Le fils de la maison, avant sa maladie, avait l’habitude, en ses loisirs artistiques, de tailler les survivants en