Page:Goncourt - La Fille Élisa, Charpentier, 1877.djvu/240

Cette page n’a pas encore été corrigée

si elle se complaisait à cette destruction.

Dans le néant et le vide d’un cœur en prison, une instinctivité tendre et sans emploi de sa tendresse, à défaut d’autre affection, ressuscitant en Élisa « le petit homme chéri », l’avait fait, tout à coup, se retourner vers son passé d’amour, se réfugier un moment dans la douceur posthume du seul bon rappel qui lui fût resté de la vie. Cela avait duré quelques heures et cela avait été tout. L’amant appelé par la pensée d’Élisa, combien de temps l’avait-elle revu avec son bon visage, ses yeux caressants, ses gentils gestes, tout ce qu’elle avait aimé dans l’homme aimé ?... Tout de suite son évocation l’avait menée au cimetière d’Auteuil, tout de suite elle avait eu devant elle l’assassiné avec ce rire dans lequel l’agonie avait mis quelque chose qui était si peu de lui. Ainsi les gens qui ont perdu un être cher, mort fou, et que les rêves ne leur remontrent jamais que dans sa fureur ou sa dégradation de créature intelligente,