Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

elle adressées par son mari, qui, alors pris d’un accès de brutalité, la retournerait violemment de son côté, mouvement dans lequel elle expirerait.

Daudet me dit qu’il n’a plus l’émotion du théâtre, qu’il n’en a que la nervosité agacée. La pièce lui a semblé bien marcher à la répétition, mais son frère est venu lui dire, ce matin, que son fils lui avait rapporté, que les corridors étaient tout à fait hostiles à la pièce.

Me voici au théâtre, derrière les dos émotionnés de Mme Daudet et Mme Hennique. Une salle contenant le dessus du panier du tout-Paris, au milieu duquel figure le jeune ménage Daudet-Hugo, et où Jeanne, qui a ressenti, dans la journée, les premières douleurs de l’enfantement, est accompagnée de son accoucheur.

Un premier acte écouté sympathiquement, un second acte, où Burguet a un très grand succès. Ah diable ! voilà le troisième acte, presque emboîté de suite, et le dramatique de la scène tué par les rires. Un médecin ridicule, une agonie trop compliquée, la phrase finale : « Ça… c’est ma femme ! » mal dite. Toutefois, pour moi la cause de l’insuccès n’est pas due à cela, elle est en ceci : c’est que le dramatique de l’acte, au milieu de détails d’une vérité absolue, ne s’appuie pas sur la vérité d’un être.

Dimanche 7 février. — Dîner chez Charpentier avec