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Mardi 31 janvier. — Aujourd’hui, où je voudrais répondre à l’article de l’ami Bauër, qui vise un peu ma préface de : À bas le Progrès, dans laquelle je repousse l’inspiration scandinave et slave pour notre théâtre, je suis trop souffrant pour écrire l’article.

Aux inspirations, que le théâtre français, dit Bauër, a tirées de la tragédie grecque, de la comédie latine, des pièces espagnoles, et du bénéfice qu’il y aurait pour notre théâtre d’emprunter des inspirations au Nord, j’aurais voulu répondre que les inspirations grecques, latines, espagnoles étaient des inspirations de cervelles de la même famille, aux circonvolutions identiques, de cervelles latines et non hyperboréennes.

J’aurais voulu rappeler à Bauër, dans une conversation sur la mort, entre Zola, Daudet, Tourguéneff, la mention d’un certain brouillard habitant les cervelles du Nord, le brouillard slave, selon l’expression de Tourguéneff, et dont il disait : « Ce brouillard a quelque chose de bon pour nous : il a le mérite de nous dérober à la logique de nos idées, à la poursuite de la déduction. » — Brouillard tout à fait contraire à la fabrication de notre théâtre, fait de clarté, de logique, d’esprit.

À cette assertion, que le théâtre naturaliste était mort de la représentation d’êtres exceptionnels, j’aurais voulu lui faire remarquer, qu’un tas de chefs-d’œuvre, comme Don Quichotte, Werther, Le Neveu de rameau, Les Liaisons dangereuses, etc., sont des monographies d’êtres exceptionnels, qui imaginées