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dans le monde bien autrement du dévouement pour un homme que pour une idée.

En nous promenant avant dîner, Rodin me parle de son admiration pour les danseuses javanaises, et des croquis qu’il a faits d’elles, croquis rapides, pas assez pénétrés de leur exotisme, et qui ont quelque chose d’antique. Il cause aussi d’études semblables sur un village japonais, transplanté à Londres, où se voyaient également des danseuses japonaises. Il trouve nos danses trop sautillantes, trop brisées, tandis que dans ces danses, c’est une succession de mouvements engendrant et produisant un serpentement, une ondulation.

Nous recausons après dîner avec Rodin, et je lui dis que l’œil de l’Europe ancienne et moderne était et est resté plus sensible à la ligne qu’à la couleur, et je lui donnai cet exemple des vases étrusques dont toute la beauté vient de la silhouette des figurines, tandis que dans la céramique de la Chine et du Japon, c’est avant tout la tache colorée qui en fait la beauté.

Samedi 1er août. — Demain c’est la fête de Daudet, mais on la lui souhaite aujourd’hui, où le jeune ménage est venu dîner.

Et à peine sorti de table, dans cette maison à l’atmosphère littéraire, on cause poésie ancienne