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Vendredi 29 juillet. — Promenade dans la forêt de Sénart.

Daudet me cause de la misère qu’il a faite avec Racinet, le dessinateur. Un temps de misère effroyable, pendant laquelle ils avaient, tous deux, la toquade d’aller coucher, l’été, dans les bois de Meudon, emportant un pain, un morceau de fromage, et la couverture du lit de leur hôtel. Il remémore les curieux spectacles de nature qu’ils ont vus, les duels de crapauds, les ruts des chevreuils, et tout le surnaturel, que la nuit met dans l’ombre des grands arbres. Il parle d’un rire ironique qui les a poursuivis, une partie d’une nuit, et qui, après lui avoir inspiré une grande terreur, l’a jeté dans une colère qui l’a fait se précipiter dans un fourré d’épines, sans pouvoir rien découvrir.

Dimanche 31 juillet. — Le bleu céleste des yeux d’Edmée, ma filleule, et les gentils gestes de guignol, venant au bout de ses mignonnes mains, si joliment se contournant. Sur sa petite chaise, où elle est attachée, quand elle est à table entre nous, elle a des renversements, comme en face de visions au plafond de choses ou d’êtres invisibles, auxquels s’adressent ses petits bras tendus et son gazouillement aimant.

Mercredi 3 août. — J’ai été si malade cette nuit,