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lendemain, il annonçait que le pape, qu’on avait cru mort, allait mieux, et grâce à cette mirobolante invention, il échappait à l’emportement et aux sévices du premier moment. C’est bien une imagination farce à la Daudet.

Vendredi 22 juillet. — Un détail sur le goût littéraire de Gambetta. Dans les derniers temps de sa vie, un jour Daudet lui contait ceci : passant sur la place du Carrousel, par une de ces journées d’août, où cette place a la chaleur torride du désert, il voyait, derrière une voiture d’arrosage, un papillon traverser toute la place, dans la fraîcheur de l’eau tombant en pluie, et Daudet s’extasiait sur l’intelligence de l’insecte, et le joli de la chose.

À ce récit, et au plaisir littéraire que Daudet y mettait, Gambetta le contempla, un moment, avec un regard tout plein d’une immense commisération, et qui semblait lui dire, qu’il était condamné à rester toujours le Petit Chose.

Mardi 26 juillet. — Le beau mot ! Dans une bataille, sous Louis XV, le marquis de Saint-Pern, voyant son régiment ébranlé par une volée de boulets, dit, en fouillant tranquillement dans sa tabatière : « Eh bien quoi, mes enfants, c’est du canon, cela tue, et voilà tout ! »