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tresse de maison appuie parfois son front, se contourne une élégante statuette en marbre blanc, au faire de Coysevox.

La causerie est une causerie esthétique sur l’amour, et elle dit qu’après la possession, il est bien rare, que les deux amants s’aiment d’un amour égal, et que cette inégalité dans le sentiment de l’un et de l’autre, fait des attelages boiteux, et qui ne marchent pas en mesure. Un moment même, elle célèbre le bonheur d’être seule dans la vie, et sur ce que je lui fais remarquer que c’est bien vide une maison, un grand appartement pour un être seul, elle m’interrompt, et s’écrie, que, lorsque dans cette maison, dans ce grand appartement, il y a deux êtres, comme elle en connaît, qui ne s’emboîtent pas, c’est encore plus triste.

Et lâchant sa dissertation sur l’amour, elle revient à ses caniches, à l’histoire de leurs mœurs, parlant d’un prédécesseur de la caniche ayant l’horreur des bains, et qui lorsqu’on lui en préparait un, simulait le plus admirable rhume de cerveau qui se puisse imaginer.

Jeudi 31 mars. — Mme Daudet rentre de la séance de l’Académie intéressée, amusée, égayée. Elle dit que c’est presque une réunion de famille, que les cinq cents personnes, qu’on rencontre partout à Paris, se donnent rendez-vous là, et qu’entre ce monde, il