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corps du poisson avec le fond, le fait remonter deux ou trois pieds en l’air.

Jeudi 31 octobre. — Je suis arrivé chez le notaire, ne croyant pas à la chose, et ai été aussitôt rejoint par mon co-prêteur, qui m’a débité des histoires peu rassurantes sur notre débiteur. Une demi-heure s’est passée, sans que personne apparût. Enfin le représentant de l’entrepreneur de vidange a fait son entrée, avec un portefeuille sous le bras, ayant l’air d’être gonflé de chiffons de la banque. Le notaire s’est mis à lire, d’une voix bredouillante, un long acte très peu clair et soulevant un tas d’objections : « Bon, me suis-je dit, il va se présenter quelque difficulté, et le payement sera rejeté à quelque calende, qu’on ne verra jamais. » Non, tout s’est pacifié, arrangé, au moyen d’un contrat de mariage qu’on a été chercher incontinent, et à ma stupéfaction, mon notaire m’a remis entre les mains soixante-quinze vrais billets de mille francs.

Ces 75 000 francs, avec 6 500 qui me sont encore dus, 8 500 francs que j’ai attrapés de mon ex-notaire, défalcation faite des frais, me font rentrer dans mes 80 000 francs, avec les intérêts dus depuis trois ans : « Ça finit aussi bien qu’une mauvaise affaire peut finir ! » m’a dit Duplan, et je suis complètement de son avis. Mais jamais plus, jamais plus, je ne placerai de l’argent sur hypothèque.