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tographes, et la Taverne anglaise, qui semble le réfectoire des vieux romantiques. On me disait que Georges, l’ancien garçon à la mémoire extraordinaire, était devenu le sacristain d’une chapelle protestante de la rue Royale.

―――― Ces jours-ci, on a fait la vente d’un nommé Arnauldet, frère d’un employé que j’ai connu au cabinet des Estampes. Au milieu d’un fouillis immense, il y a quelques très jolies et charmantes choses, achetées à vil prix par Burty, qui a suivi la vente, depuis les salles d’en haut jusqu’à Mazas : la salle d’en bas, où on vend la literie et les batteries de cuisine.

Ce garçon, originaire du Poitou, et sorti d’une famille de la magistrature, en ce temps de sensualisme grossier, était un type du sensuel délicat, et du curieux dans les choses du boire et du manger.

Il n’aimait qu’une certaine eau-de-vie fabriquée près de la Rochelle, et dont la provision était vendue tous les ans, à l’Angleterre. Cette eau-de-vie donc, il la faisait racheter en Angleterre, et il la buvait dans un petit verre, gardé dans un étui, qu’on ne lavait jamais, et qui avait pris l’irisation d’un lacrymatoire antique. Le café, on lui en triait un petit sac, qui était choisi grain par grain. Il faisait venir des huîtres d’un certain marchand d’huîtres de Marennes, et les donnait à garder dans une cave du quar-