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dans les visites que nous faisions, mon frère et moi, au critique. Elle nous donne sur le grand, le très grand écrivain, ce détail relatif à la singulière maladresse de ses mains, et au côté pleurard d’enfant rageur, qu’il conserva toute sa vie. À vingt ans, s’efforçant d’allumer le feu de sa chambre, et n’y réussissant pas, il finissait par se rouler, en pleurant, sur le parquet.

Jeudi 20 mars. — Les Japonais ont une aimable ironie, une ironie un peu à la française. Aujourd’hui, comme dans un obi, une ceinture d’une beauté exceptionnelle, je me plaignais d’une terrible tache qui la déparait : « Oui, oui… mais vous posséderez peut-être, me répondit Hayashi, un peu de la transpiration d’une très belle Japonaise. »

Ce soir chez Daudet, le petit Hugues Leroux me donne ce plaisant et réconfortant détail. Un vieux bonhomme, peu fortuné et myope, vient tous les jours lire mon feuilleton de Chérie, à la devanture du Gil Blas, avec une lorgnette de spectacle. Si non è vero, è bene trovato.

Samedi 22 mars. — Ce soir le banquet Ribot, où malgré mon éloignement pour les banquets, je suis presque amené de force par Fourcaud. Cent quatre--