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Salle grinchue, disposée à égayer la représentation. Çà et là, des têtes de jeunes gens du ministère des Affaires étrangères, empreintes d’une ironie gandine, ou des têtes de vieux journalistes conservateurs, affectant une tristesse de commande, pour le froissement de leurs convictions monarchiques. La police a fait dire à Deslandes qu’il fallait s’attendre à du bruit.

Des rires accueillent le démontage des diamants de la couronne, opération du reste faite par Berton avec un appareil d’instruments, une lenteur, un effort, qui semblent la parodie, la charge de la chose. Dans le livre, on se le rappelle, c’était fait avec un sécateur de rencontre… À la fin, des sifflets très aigus partant d’une loge, se mêlent aux applaudissements.

On va tout de même souper chez Voisin, Mme Daudet très émue à mon bras. Je dis au ménage, ce que je crois, c’est qu’il n’y a pas au fond vraiment de question politique, mais que ça va être seulement une question de chic pour les clubs, de venir chuter la pièce, et qu’on doit s’attendre à cinq ou six représentations cahotées, après quoi, la pièce marchera.

Zola, lui, proclame qu’il faut faire du théâtre, en s’en fichant… qu’il croit que sa pièce, à lui, n’ira pas jusqu’au bout.

On parle de l’admirable scène d’ivresse de Dieudonné. Daudet dit que c’est lui, qui lui a donné le la de sa pocharderie royale, en le poussant à jouer la scène, sans flageoler, sans tituber, et seulement avec