Page:Goncourt - Journal, t6, 1892.djvu/235

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Jeudi 21 septembre. — La princesse était, ce soir, dans les souvenirs mauvais et tristes de sa vie. Elle parlait de son retour à Paris, et de sa marche de la gare du Nord au boulevard Haussmann, sans pouvoir trouver de voiture. Enfin, écrasée de fatigue, elle s’était assise sur un banc, qui existe encore en face de son ancien hôtel de la rue de Courcelles. Et là, mourant de soif, et n’osant entrer nulle part, elle envoyait Julie sa femme de chambre chercher un verre de groseille, chez un marchand de vin à la porte de son hôtel, — un marchand de vin, devant lequel, au temps de sa prospérité, elle était passée si souvent.

Vendredi 29 septembre. — Oui, j’ai eu dix-huit maîtres de piano, et sept maîtres d’écriture. Ah ! de drôles de maîtres, reprend la princesse. J’ai eu un certain maître d’écriture qui avait une grosse tête toute ronde, avec de petits cheveux blancs frisés, et toujours accompagné d’un caniche. Celui-ci, sa page d’écriture donnée, passait son temps à me retirer des doigts ma plume, à la jeter au milieu de la chambre, et à la remplacer par une toute neuve. Quand il est parti, il y a eu des plumes taillées à la maison, pour jusqu’à mon mariage…

On m’avait découvert un maître d’allemand, possédant une joue mangée par une immense dartre, et toute la leçon, il en faisait tomber des écailles.

Le maître d’anglais, lui, était un petit prêtre irlan-