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nant et coruscant immeuble, migrainé par les odeurs et les senteurs des grandes dames, qu’il a habillées toute la journée.

Mardi 12 septembre. — Parlant de la bonté de son intérieur, de sa chambre, de son lit, la princesse dit : « C’est moi qui n’étais pas heureuse, quand à Compiègne, on m’a donné le lit du pape… Un lit d’une grandeur, vous ne pouvez en avoir une idée… Pour n’avoir pas froid, j’étais obligée de mettre toute ma garde-robe sur moi ».

Jeudi 14 septembre. — Visite du khédive, le petit-fils de Mehemet-Ali. C’est un Oriental à la barbe rousse, ressemblant à un Théophile Gautier, qui aurait du louche, un rien de strabisme dans le regard. Il joue de la langue française, avec une parfaite connaissance de tous les parisianismes, pimentés d’une certaine gouaillerie sentant le ruisseau. C’est cependant un vieux Turc, un tranquille metteur à l’ombre de ses ministres, qui bonhomise merveilleusement sa pensée, en les euphémismes spirituels d’un parfait civilisé. Seulement, au milieu de sa phraséologie, où il se peint bourgeoisement au temps de sa puissance, comme « un agriculteur, un sucrier », il y a le terrible accent qu’il donne à des phrases, comme celle--