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Samedi 10 juin. — Aujourd’hui La Rounat m’a écrit au sujet d’Henriette Maréchal qu’il voudrait reprendre, et j’attends dans le cabinet du secrétaire de l’Odéon.

Une glace de cheminée, avec de chaque côté, fixée au mur, une lampe girandole en fer poli. Sur la cheminée, placés de travers et comme poussés l’un contre l’autre par un amoncellement de papiers, deux vases blancs à dessins bleus, d’un ancien modèle de Marly, et dans lesquels sont en train de mourir deux grandes herbes exotiques à feuilles poussiéreuses. Des meubles recouverts d’une imitation de velours, chargée de fleurs-rosaces, dont le relief pourpre se détache d’une trame d’or : une imitation très mal faite, et flétrie de cette flétrissure particulière au théâtre, et donnant à la laine, à la soie, au coton des ameublements, quelque chose de la pourriture que l’on voit dans les couronnes des cimetières. Le cartonnier de rigueur dans un coin, supportant un échafaudage branlant de boîtes de papier à lettres et d’enveloppes. Au plafond et sur les murs un affreux et triste papier imitant — tout est imitation ici — un cuir naturel, gaufré de petits trèfles, et sur le mur chocolat, dans un cadre une affiche jaune des Enfants d’Édouard, pour la quarante-et-unième soirée littéraire, et à côté une grande et mélancolique aquarelle, représentant Fleuret dans le rôle de Marcasse, offert par le peintre à l’acteur.

Mercredi 14 juin.