Page:Goncourt - Journal, t6, 1892.djvu/184

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ments légèrement pédérastiques. Puis tout à coup, au milieu de la démonstration, faite à deux mètres de la toile, dans une tranquille eurythmie, d’un bond, le commis franchit la distance qui le sépare du tableau, et tout à coup, vous le retrouvez au bas de la toile, rasé à terre, appelant votre attention sur un détail, qu’il enveloppe dans le vide d’une main, ayant l’air de jouer amoureusement autour d’un sein de femme.

Et le gymnaste en caoutchouc, qui faisait ce joli petit manège pendant la journée, devant un tableau de 50 000 francs, le soir, chez Mme Adam, mon ami le voyait entrer, le cou raide, la poitrine en avant, avec, sur toute sa personne, quelque chose d’un hautain doctrinaire.

―――― Conversation entre deux hommes politiques.

L’un déclarant qu’il s’est présenté aux élections sénatoriales, qu’on lui a demandé des engagements signés, qu’il s’est retiré.

L’autre criant, sur un ton de mépris colère : « Il faut les foutre dedans les électeurs… étant donnée l’intelligence du suffrage universel… si nous ne nous livrions pas à des malversations électorales… nous serions des dupes, des foutues bêtes… »

Au fond ce que ce dernier criait : c’est la pensée intime de bien des républicains.