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beaux cuivres, de reflets de bouteilles aux formes trapues, d’un tas de vieilleries bien luisantes, qui semblaient le mobilier retrouvé d’une auberge de l’ancienne France.

Là-dedans, un cuisinier, qui faisait un poulet sauté, une matelote, un certain plat de champignons, comme nul cuisinier au monde, et qui vous apportait à voir des aquarelles de gazons émaillés de fleurettes, naïves et précieuses, comme ces tapis de fleurs que les Primitifs étalent sous les pieds de leurs martyres, et puis qui, tirant un orgue d’un vieux bahut, servait aux gens appréciant sa cuisine, des airs séraphiques.

Oui, c’était ce cabaret, le cabaret du frère de Bonvin, qui demeurait cuisinier, et attaché à la maison paternelle, tout en étant peintre et musicien. Pauvre naïf artiste, pauvre grand enfant, qui, un jour, perdant la tête, se pendit à propos d’une dette de 300 francs.

Vendredi 10 octobre. — Auguste Comte un singulier original, au dire d’une personne qui l’a connu.

Il pesait tout ce qu’il buvait et mangeait. Il avait épousé par principe une femme quelconque, mais comme exutoire de la papillonne, nourrissait une passion platonique pour une Mme D… Or cette Mme D… mourut, et tous les jours Auguste Comte portait des fleurs sur sa tombe. Cette visite journa-