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c’est nous qui les avons battus, tant les vainqueurs semblent avoir gardé, comme la rancune d’une défaite.

Mardi 6 août. — J’entre à l’Église de Schliersée, pendant la messe.

C’est le décor riant du rococo jésuite, dans une profusion d’encens, dans une musique d’orgue, mêlée de sonneries et de trompettes, et de roulements de tambour. Au milieu des tambours, des parfums, de l’allegro des voix et des instruments, de pieuses nuques de femmes aux cheveux jaunes, torsadés sous la calotte de drap qui les coiffe, des profils d’hommes roux, aux traits barbares et mystiques, aux poils frisés des saint Jean-Baptiste de la vieille peinture, me donnent chez ces populations vivant de miel et de lait, à la façon des anciens apôtres, le spectacle du vieux catholicisme, célébré par une jeune humanité.

Mercredi 7 août. — La femme, ici, semble de la femme fabriquée à la pacotille, une créature au visage embryonnaire, à peine équarrie dans une chair bise, une ébauche de nature, à laquelle le créateur n’a pas donné le coup de pouce de la gentillezza féminine. On ne sait si l’on a affaire à des femmes, à