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Bourgogne. On lui demande, en voyant le grand étui qu’il porte, s’il vend des lunettes. Le vin rend bon. La noce a pitié de sa mine piteuse, et l’emmène avec elle. Le ménétrier ne se trouve pas tout de suite. Ziem le remplace, avec un violon d’occasion, sur le classique tonneau. Tout à coup la noce le voit dérouler des papiers enveloppant un flageolet, et il joue la valse de Weber, qui fait tomber en pâmoison la mariée. Il est fêté, nourri, abreuvé, grisé, pendant quelques jours, au bout desquels, le marié, le maire du village, lui donne une lettre de recommandation pour un ami de Valence.

Il est au moment de partir, quand il a l’heureuse inspiration de vouloir montrer à ses hôtes qu’il n’est pas seulement un musicien, et il tire de son sac un portrait, dans la manière des crayonnages de Prudhon. Le marié et la mariée se font pourctraire, et Ziem est à la tête de quarante francs, une somme qu’il croit si bien une fortune, qu’en arrivant à Lyon, il se fait conduire en voiture au théâtre où l’on joue Moïse.

Il passe à Valence quelques jours, avec l’ami du maire de village de la Bourgogne, fait des portraits gagne quelque argent, qu’il verse dans le tablier d’une femme qu’on emmène en prison, et arrive, sans un sou, à Marseille.

Ne doutant de rien, il descend à l’Hôtel des Empereurs, et expose un portrait chez un papetier. Aucune commande ne vient. Un peu étonné et fort désappointé, il se rend chez une connaissance de son