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ponais, un canard qui a la parenté la plus extraordinaire avec les animaux antiques du Vatican. Si l’on en trouvait un, comme cela, dans une fouille d’Italie, il se payerait peut-être dix mille francs. Le mien m’a coûté cent vingt francs. À côté de ce bronze, mes yeux vont à un ivoire japonais, un singe costumé en guerrier du Taicoun. La sculpture de l’armure est une merveille de fini et de perfection menue : c’est un bijou de Cellini. Suppose-t-on ce que vaudrait ce bout d’ivoire, si l’artiste italien l’avait signé de son poinçon. Il est peut-être signé d’un nom, aussi célèbre là-bas, mais sa signature ne vaut encore que vingt francs, en France.

Je ne suis pas fâché d’avoir introduit un peu, beaucoup de japonaiserie, dans mon XVIIIe siècle. Au fond, cet art du XVIIIe siècle est un peu le classicisme du joli, il lui manque l’originalité et la grandeur. Il pourrait à la longue devenir stérilisant. Et ces albums, et ces bronzes, et ces ivoires, ont cela de bon, qu’ils vous rejettent le goût et l’esprit dans le courant des créations de la force et de la fantaisie.

Lundi 25 janvier. — Le dîner de Flaubert n’a pas de chance. C’est en sortant du premier, que j’ai attrapé ma fluxion de poitrine. Aujourd’hui, Flaubert souffrant manque, il est au lit. Nous ne sommes donc que Tourguéneff, Zola, Daudet et moi.

On cause tout d’abord de Taine. Comme chacun