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conversations autour d’eux, un individu de leur famille ou de leur connaissance. Eh bien ! dans les sociétés, ce rôle est pris par l’argent, il n’y a plus de recrutement pour les carrières de gloire. Dans ce pays, qu’est-ce qu’il arrive, lorsque les instincts du jeune homme sont par trop scientifiques, il se met dans une carrière satisfaisant à moitié ses goûts, à moitié son désir d’enrichissement, il devient ingénieur de chemin de fer, directeur d’usine, directeur de produits chimiques… Déjà cela commence à arriver en France, où l’École polytechnique ne fait plus de savants. »

Et la conversation continuant, Berthelot ajoutait : « Que la science moderne, cette science qui n’a guère que cent ans de date, et qu’on dote d’un avenir de siècles, lui semblait presque limitée par les trente années du siècle dans lequel nous vivons. Un homme qui sait les trois langues dans lesquelles se fait actuellement la science, peut se tenir aujourd’hui au courant. Mais voilà les Russes qui se mettent de la partie. Qui sait le russe parmi nous ? Bientôt tout l’Orient y viendra. Alors… Puis le nombre et l’inconnu des sociétés scientifiques. Aujourd’hui, j’ai reçu un diplôme de Bethléem, qui me nomme membre de la Société, je sais par le timbre qui porte New-York, que c’est en Amérique, et voilà tout… N’y a-t-il pas des Sociétés en Australie, ayant déjà publié sur l’histoire naturelle, des travaux de la plus grande importance… Un jour il sera impossible de connaître seulement les localités scientifiques…