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« Oui, très supérieure à nous, reprend Renan en s’animant. Le catholicisme est une crétinisation de l’individu : l’éducation par les Jésuites ou les frères de l’école chrétienne arrête et comprime toute vertu summative, tandis que le protestantisme la développe. »

La douce et maladive voix de Berthelot rappelle les esprits des hauteurs sophistiques aux menaçantes réalités : « Messieurs, vous ne savez peut-être pas, que nous sommes entourés de quantités énormes de pétrole, déposées aux portes de Paris, et qui n’entrent pas à cause de l’octroi, que les Prussiens s’en emparent et les jettent dans la Seine, ils en feront un fleuve de feu qui brûlera les deux rives ! C’est comme cela que les Grecs ont brûlé la flotte arabe… — Mais pourquoi ne pas avertir Trochu ? — Est-ce qu’il a le temps de s’occuper de n’importe quoi ! » Berthelot continue : « Si l’on ne fait pas sauter les écluses du canal de la Marne, toute la grosse artillerie de siège des Prussiens arrivera, comme sur des roulettes, sous les murs de Paris, mais songera-t-on à les faire sauter… Je pourrais vous raconter des choses comme cela jusqu’à demain matin. »

Et comme je lui demande s’il espère faire sortir, du comité qu’il préside, quelque engin de destruction : « Non, non, on ne m’a donné ni argent, ni hommes, et je reçois 250 lettres, par jour, qui ne me donnent le temps de faire aucune expérience. Ce n’est pas qu’il n’y aurait pas quelque chose à tenter, à trouver peut-être, mais le temps manque, le temps manque