Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/40

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

betta pour la couleur, et où on appellerait les vraies et rares capacités du pays, et non une République, composée presque exclusivement de tous les médiocrates et de toutes les ganaches, vieilles et jeunes, de l’extrême gauche.

 

Ce soir, les bouquetières ne vendent plus, sur toute la ligne des boulevards, que des œillets rouges.

Mardi 6 septembre. — Au dîner de Brébant, je trouve Renan, assis tout seul, à la grande table du salon rouge, et lisant un journal, avec des mouvements de bras désespérés.

Arrive Saint-Victor, qui se laisse tomber sur une chaise, et s’exclame, comme sous le coup d’une vision terrifiante : L’Apocalypse… les chevaux pâles !

Nefftzer, du Mesnil, Berthelot, etc., etc., se succèdent, et l’on dîne dans la désolation des paroles des uns et des autres. On parle de la grande défaite, de l’impossibilité de la résistance, de l’incapacité des hommes de la Défense nationale, de leur désolant manque d’influence près du corps diplomatique, près des gouvernements neutres. On stigmatise cette sauvagerie prussienne qui recommence Genséric.

Sur ce, Renan dit : « Les Allemands ont peu de jouissances, et la plus grande qu’ils peuvent se donner, ils la placent dans la haine, dans la pensée et la perpétration de la vengeance. » Et l’on remémore toute cette haine vivace, qui s’est accumulée depuis