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Lundi 24 avril. — Quel appoint et quel chauffage apporte dans cette insurrection, le vin aux sentiments, patriotiques, libéraux, communards ! La redoutable statistique qu’il y aurait à faire de tout le vin, bu dans ce temps, et pour combien il entre dans l’héroïsme national. On ne voit que barriques, roulées par des gardes nationaux vers leurs postes, et les bataillons qui partent pour la gloire, ne partent qu’escortés de chariots, effondrés sous les tonneaux.

Je reparcours, ce soir, la Confession d’un enfant du siècle, dont j’ai trouvé l’édition originale. J’ai déjà l’édition originale de Volupté. Je voudrais avoir celles de Mademoiselle de Maupin et de Lélia. Ces livres pour moi sont des plus curieux : ce sont des analyses de l’inassouvissement, — la maladie de l’intelligence du temps.

Mardi 25 avril. — Aujourd’hui c’est la trêve pour l’évacuation des habitants de Neuilly.

Je pousse au rempart. Jusqu’à la barrière de l’Étoile, rien que des lampadaires cassés, et des écorniflures dans la pierre des maisons. Au delà, c’est autre chose. La barrière de l’Étoile est tout étoilée d’éclats aux creux noirâtres, et dans le bas-relief de l’Invasion, un obus a enlevé le bras de l’enfant, porté sur l’épaule de sa mère. En bas, il y a des bornes de granit, brisées en fragments de la grosseur d’un morceau de sucre.

La vraie dévastation commence à l’Avenue de