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de sa sœur, il se décidait à aller trouver Crémieux.

Il lui expose la chose, les désirs de sa sœur, et fait appel à la bienveillance que le ministre lui a toujours témoignée. Le ministre ne le laisse pas finir, lui dit : « Mon cher enfant, vous savez combien je vous aime ! » et là-dessus, il l’embrasse. Crémieux, pendant son ministère, a toujours embrassé tout le monde. « Il suffit, continue-t-il, que vous manifestiez ce désir, votre beau-frère ne sera pas destitué, vous pouvez être tranquille. » Sur cette assurance, M. P… gagne la porte. Crémieux le rappelle :

— « Vous dites que votre beau-frère s’appelle P…, qu’il est à Blois.

— Parfaitement.

— Eh bien ! je vous promets qu’il ne sera pas destitué aujourd’hui, mais dans quelques jours, je ne suis pas sûr que ça n’arrive pas. Tenez, il y a peut-être un moyen d’arranger cela. Qu’est-ce que désire votre beau-frère ?

— Mais, il a sa famille, ses intérêts à Orléans. Il y a une place de conseiller vacante, je crois que cette nomination le rendrait très heureux.

— Très bien, très bien ! reprend Crémieux, je vais le destituer à Blois, et du même coup le nommer à Orléans, et l’ayant ainsi nommé moi-même, vous concevez, je ne pourrai plus le destituer. »

On demande le chef du cabinet : — « Préparez la nomination de P… à Orléans. — Mais, monsieur le ministre, le mouvement est fait. — Ah ! c’est très contrariant, très contrariant… ça ne fait rien…, j’ai