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ne tue l’unique cheval de la voiture de déménagement, anxieux qu’un éclat ne blesse ou ne tue un de ces pauvres diables de déménageurs, blaguant bravement les détonations les plus rapprochées.

J’emménage mes bibelots dans une partie de l’appartement, que Burty occupe sur le boulevard, au coin de la rue Vivienne, et qu’il met très gentiment à ma disposition.

Tout à coup un rappel forcené. Nous sortons. On nous dit qu’on se bat à l’Hôtel de Ville. Sur notre chemin, c’est une effervescence, une agitation, au milieu de laquelle, toutefois, je vois des gardiens de Paris regarder tranquillement des photographies, dans des stéréoscopes. Rue de Rivoli, nous apprenons que tout est fini, et nous voyons passer, rapide dans une escorte de dragons et de chasseurs, le général Vinoy. Et tandis que des lignards de Puteaux, tout enguirlandés de morceaux de treillages de jardins, remontent la rue de Rivoli, des canons défilent sur le quai, se dirigeant vers l’Hôtel de Ville.

Le soir, le boulevard présente l’aspect des plus mauvais jours révolutionnaires. Des discussions toutes prêtes à en venir aux coups. Des mobiles parisiens accusant les gens à Trochu, d’avoir tiré sans provocation ; des femmes criant qu’on assassine le peuple. Nous voici aux dernières convulsions de l’agonie.

Lundi 23 janvier. — Un curieux tableau ! Dans les restaurants encore ouverts, les dîneurs apportent