ceaux de pain, des tablettes de chocolat, de gros cornichons, et des sucres d’orge de toutes couleurs.
On me contait ceci. Une pauvre vieille femme avait toute sa vie et toute son âme concentrées sur un fils qui, d’employé de la banque, est devenu, à l’heure présente, soldat. Tous les jours, la pauvre femme va recevoir, à la queue, sa maigre provision de cheval, prépare son petit repas, met deux couverts, partage la viande entre l’assiette de son fils et la sienne, divise le pain en deux morceaux. Et, le repas vite achevé, la vieille femme court donner à un pauvre la portion de son fils.
J’ai à côté de moi, dans un café, le caquetage vide et bruyant d’une femme en velours, attablée avec une apparence de polytechnicien transformé en canonnier. Ce caquetage qui m’insupportait autrefois, m’est agréable : il me rejette à hier.
Dimanche 25 décembre. — C’est Noël. J’entends un soldat dire : « En fait de réveillon, nous avons eu cinq hommes gelés sous la toile ! »
Quelle singulière transmutation des commerces, et quelle bizarre transfiguration des boutiques ! Un bijoutier de la rue de Clichy expose maintenant dans des boîtes à bijoux, des œufs frais enveloppés de ouate.
En ce moment une grande mortalité à Paris. Elle n’est pas absolument produite par la faim. Et les morts ne se composent pas uniquement des ma-