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luxueusement habillé de soie violette, criant, trépignant, faisant rouler sur le pavé de marbre le bruit strident d’un immense cheval de bois, le petit Feydeau, le délicieux petit ange, à notre demande des nouvelles de son père, nous dit avec le sans-cœur inconscient d’un enfant terrible : « Papa ! papa ! ah ! il est très malade, il est très malade ! » et aussitôt il recommence à secouer son cheval.

Mme Feydeau arrive dans une robe de soie rouge, de ces robes qui mettent et roulent des flots d’étoffe derrière les pas de la femme, et nous dit : « Eh bien ! vous savez, il est très malade… Il a été douze jours sans pouvoir se mettre dans son lit ni dormir… Il avait un rhumatisme remonté dans la poitrine et qui l’étouffait… Mercredi, le lendemain du jour où Flaubert le vit, et où il y avait un peu de mieux, le matin, en se levant, il allait très bien, et venait auprès de mon lit, et restait à causer avec moi. Mais à peine était-il entré dans sa chambre, que je m’entendis appeler, et le trouvai bégayant avec une voix qui me dit : “Je veux qu’on me lève !” »

Et elle imite l’horrible bégayement de l’homme frappé d’une hémiplégie. « Il a retrouvé la parole, mais il a un bras et tout un côté qu’il ne peut remuer. C’est le chagrin de ce qui s’est passé… »

Mercredi 28 avril. — Rue de Courcelles. La princesse a fait d’une manière impromptue, comme aimable surprise à l’Empereur qui vient demain chez