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congé. C’est le temps de mon traité, mon Dieu ! J’ai de certaines facilités de sauter d’un sujet à l’autre, quoique ce soit le plus fatigant de mon affaire. J’ai professé à Liège trois fois par semaine. J’ai fait quatre ans de cours à l’École normale. J’ai fait vingt-deux leçons sur Bossuet… Et puis je donne tout ce que j’ai : le fond de toutes mes notes. Je vide mon sac. Je suis à mes dernières cartouches et je tire tout… Franchement, au fond je suis blasé ou plutôt dégoûté, las. Toutes ces insultes, toutes ces calomnies, pour un petit honneur qui n’est rien du tout, et qu’on estime beaucoup ! » — Ici je le sens blessé à fond, de l’attaque d’un journal de ce matin, qui, en annonçant son invitation pour une fournée de Compiègne, l’accusait d’avoir fait renvoyer son ami Barbey d’Aurevilly du Pays : — « Si j’avais dix mille livres de rentes, reprend-il, je sais bien ce que je ferais, ou plutôt ce que je ne ferais pas. » Et il nous confie qu’il n’ira pas à Compiègne, où les journaux le font aller, que sa santé ne le lui permet pas, ses infirmités, sa vessie… Il ne pourrait rester là toute la soirée. Ce sont de trop grandes corvées pour son âge.

On cause de l’histoire moderne, de sa supériorité sur l’ancienne, qui ne voyait jamais ni le cadre ni le milieu des événements, et Sainte-Beuve déclare que Villemain ne sait absolument des événements que ce qu’il y a dans les livres, et que la connaissance de l’art d’un temps manquait jusqu’ici aux historiens. La causerie arrive au XVIIIe siècle. « C’est le temps que j’aime le mieux, s’écrie Sainte-Beuve. Il