Page:Goncourt - Journal, t2, 1891.djvu/70

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou presque toutes ont la tête carrée, des têtes de volonté et d’endurcissement, de mauvaises têtes de paysannes — et déprimées d’une manière curieusement uniforme. Je n’y ai pas vu une jolie figure, un visage intéressant. Ce monde aux yeux renfoncés, est dur, concentré, avec un tas de choses amassées sous l’ensevelissement des traits. Toutes, quand on passe au milieu d’elles, restent penchées sur leur tâche, la physionomie fermée. Il semble qu’il y ait un mur entre votre regard et elles. Leur visage ne dit, n’exprime rien ; on sent qu’il fait le mort.

Êtes-vous passé, et vous retournez-vous ? vous voyez les yeux lentement se soulever, et l’on se sent dans le dos, jusqu’à la porte, les regards de toutes ces femmes dardés sur vous, en une curiosité méchante.

 

… Le directeur m’entretenait des ruses de ces femmes, murées dans le silence, des ruses pour correspondre entre elles, d’une lettre d’amour envoyée à une compagne par une lesbienne, qui en avait découpé les lettres dans le Pater et l’Ave d’un livre de prières, et les avait cousues ensemble sur un bout de chiffon.

29 octobre. — Un détail curieux donné par Édouard sur la répulsion, l’épouvante produite par le zouave sur l’imagination allemande.

Danremont, l’attaché plénipotentiaire près le roi de Hanovre, promenait un jour son fils, habillé en zouave. Le roi de Hanovre, qui est aveugle, entend