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mains lui démangeant, il restait, des quarts d’heure, à regarder les pommes de terre montant à la surface, dans le bouillonnement d’une grande marmite.

Il souffrait là, et c’était là sa double plainte à sa mère, quand, par hasard, elle venait le voir ; il souffrait de mourir de faim et de coucher à la cave : la rue étant en contre-bas.

Dans cette pension, il était blessé par un petit démocrate en sabots, et on le rapportait à la maison dans une couverture.

On le remettait en pension à Lagny, tout près de leur propriété de Pomponne, alors sous le séquestre. Et le fermier de la propriété apportait, tous les mois, à la pension, le blé, pour le pain des deux enfants, encore très parcimonieusement nourris.

La pension, vendue à une ancienne religieuse et devenue un pensionnat de demoiselles, il était placé avec son jeune frère, rue Popincourt, chez Planche. Toujours la faim, et les grands volant les pains, la nuit, au moyen de fausses clefs.

Et pour toutes visites, les visites de la vieille Reine, la nourrice de sa mère, venant tous les quinze jours et leur apportant à chacun, une brioche de deux sous, un décime de la République à partager entre eux deux, — et leur coupant les ongles.

— M. André, le banquier, avait calculé qu’une rose poussée chez lui, revenait à six francs, un radis à vingt sous.

5 juillet. — Rue Saint-Guillaume, au fond de l’île