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commerce d’orfèvre, furent mangées par lui, au jeu, de 1789 à 1793.

21 février. — Je vais voir l’Exposition des dessins de Delacroix.

Toutes les miettes d’études, toutes les raclures de carton, toutes les bribes de crayonnage, tous les ratages, tous les repentirs, tous les essuie-pinceaux du peintre sont là, exposés en grande pompe, religieusement. Il y a vraiment, dans ce moment-ci, un engouement des célébrités défuntes, un amour des riens laissés par elles, qui ressemble à un culte des saintes reliques, — et je ne désespère pas de voir bientôt, vendre aux Commissaires-priseurs, l’empreinte des doigts de pied d’un peintre illustre sur ses dernières chaussettes.

— Souvent les honnêtes femmes parlent des fautes des autres femmes, comme de fautes qu’on leur aurait volées.

— Les contours des visions, dans le rêve, ont un semblant de la ligne diffuse des dessins, trempant dans l’eau… Quel mystère que le rêve, cet état ressemblant à de la mort vivante… Et pourquoi dans le rêve, cette richesse des sensations de la peur, de l’épouvante, qu’on dirait touchée chez nous, par un bouton électrique correspondant à nos fibres intimes ?

— Les choses, depuis le commencement du monde,