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En cherchant son roman, il a découvert un pêle-mêle de papiers, curieusement documentaires, et dont il a commencé une collection !

C’est la confession autographe du pédéraste Chollet, qui tua son amant par jalousie, et fut guillotiné au Havre : une confession pleine de détails intimes et furibonds de passion.

C’est la lettre d’une fille d’une maison de prostitution, offrant toutes les ordures de ses tendresses à un souteneur.

C’est l’autobiographie d’un malheureux qui, à trois ans, devient bossu par devant et par derrière, puis dartreux à vif, et que des charlatans brûlent avec de l’eau-forte, puis boiteux, puis cul-de-jatte, le récit sans récrimination, et terrible par cela même, d’un martyr de la fatalité, — morceau de papier, qui est encore la plus grande objection, que j’ai rencontrée dans ma vie contre la Providence et la bonté de Dieu.

Et nous plongeant dans les abîmes de ces cruelles vérités, nous nous disons la belle publication à faire pour des philosophes et des moralistes, d’un choix de documents pareils, avec pour titre : Archives secrètes de l’humanité.

À peine nous sommes-nous promenés cette nuit, avant de nous coucher, un petit moment, dans le jardin : le paysage avait l’air d’un paysage en cheveux.

2 novembre. — … Nous demandons à Flaubert de nous lire quelques-unes de ses notes de voyages.