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tais bien amusée… Je regrette beaucoup Rouland… Au fond, on change toujours les hommes et jamais les choses… Là-dessus je me sauve… »

On dîne, et après dîner, Sainte-Beuve se plaignant de la vieillesse, on lui dit que jamais il n’a été plus jeune : « C’est vrai, s’écrie la princesse, il a rompu avec un tas de bêtises, d’idées tristes… J’aime bien mieux ce que vous faites maintenant… N’est-ce pas vrai, Messieurs, que ses articles sont aujourd’hui d’une liberté… ça va, ça va… il patauge dans le vrai !

— « Mon Dieu, oui, — fait Sainte-Beuve, un peu rouge du compliment — la critique, c’est de dire tout ce qui passe par la tête… ce n’est que ça ! »

25 juin. — Ce cabinet, témoin de tant de choses redoutables, ce confident de secrets si noirs, ce cabinet du préfet de police, le croirait-on ? il est tout plein d’amoureuses et blondes peintures, de nudités friponnes, de fillettes aux coquets minois, qui ne couvrent pas seulement les panneaux, à l’affreux papier impérial, semé d’abeilles d’or, mais sont éparses sur les fauteuils, les chaises, le bureau, répandues, étalées partout. « Oui, nous dit Boitelle, quand on voit comme moi, toute la journée, de si vilains individus, c’est reposant d’avoir, de temps en temps, une jolie chose à regarder. »

Et il nous introduit dans son capharnaüm intime, la maisonnette du jardinier du petit jardin de la préfecture, bondé de tableaux jusqu’au toit, et où,