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Ce journal ne devait paraître que vingt ans après ma mort. C’était, de ma part, une résolution arrêtée, lorsque l’an dernier, dans un séjour que je faisais à la campagne, chez Alphonse Daudet, je lui lisais un cahier de ce journal, que sur sa demande j’avais pris avec moi. Daudet prenait plaisir à la lecture, s’échauffait sur l’intérêt des choses racontées sous le coup de l’impression, me sollicitait d’en publier des fragments, mettait une douce violence à emporter ma volonté, en parlait à notre ami commun, Francis Magnard, qui avait l’aimable idée de les publier dans le Figaro.

Or voici ce journal, ou du moins la partie qu’il est possible de livrer à la publicité de mon vivant et du vivant de ceux que j’ai étudiés et peints ad vivum.

Ces mémoires sont absolument inédits, toutefois il m’a été impossible de ne pas à peu près rééditer, par-ci, par-là, tel petit morceau d’un roman ou d’une biographie contemporaine qui se trouve être une page du journal, employée comme document dans ce roman ou cette biographie.

Je demande enfin au lecteur de se montrer indulgent pour les premières années, où nous n’étions pas encore maîtres de notre instrument, où nous n’étions que d’assez imparfaits rédacteurs de la note d’après nature ; puis, il voudra bien songer aussi qu’en ce temps de début, nos relations étaient très restreintes et, par conséquent, le champ de nos observations assez borné[1].

E. de G.

  1. Je refonds dans notre Journal le petit volume des Idées et Sensations qui en étaient tirées, en les remettant à leur place et à leur date.