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despotisme : révolte dont les vieilles filles se vengèrent en cherchant à créer une grande situation à la comtesse de Provence.

Marie-Antoinette avait-elle mieux à attendre des autres femmes de la famille ? Madame Élisabeth n’était encore qu’une enfant. Madame Clotilde était entraînée vers une amie de son âge. Elle était poussée vers la Dauphine par cette loi des contraires, qui est souvent la loi des sympathies : calme, lente, paresseuse, elle se rapprochait instinctivement de cette gaieté vive dont elle aimait le coup de fouet et l’aiguillon. Malheureusement, madame de Marsan était là qui la retenait[1].

Le triomphe de Marie-Antoinette avait été complet et de premier coup sur le plus jeune de ses beaux-frères, le comte d’Artois. Plus jeune encore que la Dauphine, sortant de l’enfance, le comte d’Artois annonçait déjà le vrai modèle d’un prince français. Déjà il réalisait les traits d’un héros de chevalerie, et c’est demain que le monde le surnommera Galaor. Il avait les grâces de sa belle-sœur, ses goûts, ses aspirations. Il commençait la vie, il courait comme elle au plaisir, et, dès l’arrivée de la femme de son frère, quel ménage d’amusements, d’illusions, de confidences et de badinages font ces deux enfants qui semblent les princes de la jeunesse[2] ! Et quelles fêtes plus tard ! et quels deux grands enfants ! Comme la Reine re-

  1. Mémoires de Mme Campan, vol. I.
  2. Mémoires autographes de M. le prince de Montbarey. Paris, 1826, vol. II.