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rois et leur race sont nés pour nous nuire : en naissant ils sont destinés au crime, comme telle plante à nous empoisonner ; il est aussi naturel aux empereurs, aux rois, aux princes et à tous les despotes, d’opprimer les hommes et de les dévorer, qu’aux tigres et aux ours de déchirer la proie qui tombe sous leurs griffes ; ils regardent le peuple comme un vil bétail dont le sang et les sueurs leur appartiennent ; ils ne font pas plus de cas de ceux qu’ils appellent leurs sujets que des insectes sur lesquels nous marchons et que nous écrasons sans nous en apercevoir. Ils jouent aux hommes comme nous jouons aux quilles, et, quand un monstre couronné est las de la chasse, il déclare une guerre sanglante à un autre brigand de son acabit, sans sujet et souvent contre ses propres intérêts, mais pour avoir un nouveau passe-temps pour se désennuyer : il entend de sang-froid la perte d’une bataille ; il regarde d’un œil sec les monceaux de cadavres qui viennent de périr pour lui, et il est moins affecté que moi… quand je perds une partie de piquet, et qu’un de mes compères m’a fait pic, et repic et capot. C’est un devoir à tout homme libre de tuer un roi, ou ceux qui sont destinés à être rois, ou qui ont partagé les crimes des rois. Une autorité qui est assez puissante pour détrôner un roi commet un crime contre l’humanité si elle ne profite pas du moment pour l’exterminer, lui et sa b… de famille. Que diroit-on d’un benêt qui, en labourant son champ, viendroit à découvrir une nichée de serpents, s’il se contentoit d’écraser