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une parole. Bientôt Herman et Fouquier essayaient de faire cette femme coupable, non d’actes, mais d’intentions ; non de conspiration, mais de regret, mais de sentiment, mais de pensée ; et puisqu’il faut ici l’énergie d’une langue plus forte que la nôtre, disons, avec l’orateur grec, qu’ils tordirent sa conscience pour en tirer des crimes.

Herman et Fouquier demandèrent à cette reine : « Pensez-vous que les rois soient nécessaires au bonheur du peuple ? » Mais la Reine répondait : « qu’un individu ne peut absolument décider telle chose. »

Ils demandèrent ensuite à cette mère de roi : « Vous regrettez sans doute que votre fils ait perdu un trône ? » Mais la Reine répondait : « qu’elle ne regrettera rien pour son fils, tant que son pays sera heureux. »

Ils lui demandaient encore, l’interrogeant comme les Pharisiens interrogeaient le Christ : « quel intérêt elle mettait au succès des armes de la République ? » Mais la Reine répondait : « que le bonheur de la France est toujours celui qu’elle désire par-dessus tout. »

L’interrogatoire fini, Herman et Fouquier reculèrent devant les désirs de la révolution. Ils n’osèrent satisfaire à ces voix, à ces vœux, bientôt déchaînés dans un journal, et demandant à la justice de ne plus faire attendre le bourreau ; demandant des jugements semblables à ces jugements de Rome, où l’on passait du Capitole à la roche Tarpéienne ; appelant l’exécration publique sur les défenseurs