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comités et des conseils de la Révolution, rudoyait les tièdes avec la langue salée et les grosses plaisanteries du sans-culottisme. De sang-froid, et maître de lui, sous cette verve, cette vivacité et cet entrain de son caractère, prêt à tout et sachant attendre, ardent et patient, obstiné et madré, Toulan avait tous ces dons et toutes ces vertus qui mènent un complot au succès. Mais il était plus qu’un conspirateur hardi et habile : il était un de ces beaux et purs dévouements sur lesquels aime à se reposer et dans lesquels se réjouit le souvenir des hommes ; un de ces dévouements au-dessus de l’or, au-dessus de la récompense, au-dessus même de l’espoir de la rémunération, et que paye un mot, ce nom de Fidèle que les prisonnières du Temple ont donné à Toulan[1]. Et dans la reconnaissance de la Reine pour Toulan, quel étonnement, quel respect, si j’ose dire, quand elle compte jusqu’à Toulan, tous ces dévouements dans la garde nationale, tous ces dévouements dans l’Assemblée qui mendiaient la liste civile[2], quand elle reconnaît de combien est moins grand un homme de génie qui se vend qu’un homme de cœur qui se donne !

Toulan s’est voué à sauver les prisonniers du Temple ; il croit pouvoir les sauver, et il apporte son plan à M. de Jarjayes. M. de Jarjayes put bientôt juger l’homme. La Reine avait témoigné à Toulan le désir

  1. Fragments historiques, par Turgy.
  2. Dernières années, par Hüe.