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Louis XVI, représentait la Fortune et sa roue[1] !

Le soir même de l’entrée de la Reine dans la grosse tour, son fils lui est enlevé pour la nuit. De ce jour, il couchera auprès du Roi[2]. La Reine ne va plus avoir ces soins familiers, cette charge bien-aimée du lever et du coucher d’une petite créature, tout ce petit service adorable qui distrayait et occupait son chagrin. La Reine n’aura plus auprès d’elle, dans ses nuits sans sommeil, le gentil sommeil de son fils, et ce sourire des beaux rêves d’un enfant qui fait oublier aux mères qu’elles ne dorment pas.

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La Reine vit plus séparée des siens dans ce nouveau logis. Elle vit plus éloignée du bruit de la rue, et le silence de la nuit ne lui apporte plus cet air de Pauvre Jacques chanté autour du Temple par des voix amies. Les courtes promenades au jardin ne lui donnent plus ces joies, la joie de tout un jour, le bonheur de croire reconnaître une figure aimée qu’elle n’espérait plus revoir, un dévouement qu’elle croyait n’avoir point échappé à Septembre[3]. Aujourd’hui, plus une seule fenêtre ouverte sur tout l’enclos du Temple : la terreur semble avoir muré les maisons.

La Reine vit dans les tracas d’une suspicion incessante et stupide, qui lui retire encre, plume, pa-

  1. Archives nationales, Louis XVII, par M. de Beauchesne, n° VII.
  2. Journal de Cléry.
  3. Mémoires historiques sur Louis XVII, par Eckard.