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de la bien comprendre, et pars de là pour faire ma commission. On te dira du mal de la belle-mère : je le crois exagéré[1]. »

Sans doute, il y a longtemps que la Reine a triomphé dans le cœur de Madame Élisabeth de l’influence de madame de Marsan ; il y a longtemps que Madame Élisabeth s’est rendue à la bonté de sa belle-sœur, à tant de vertus devenues sérieuses dans le malheur. La communion des périls a jeté les deux femmes dans les bras l’une de l’autre ; elles s’aiment, et la vie de chacune est à l’autre. Mais ici il s’agit de plus que de l’affection et du dévouement ; il s’agit pour Madame Élisabeth d’un dogme et d’une foi de son esprit : la restauration de la maison de Bourbon par un Bourbon, cette contre-révolution par un prince français, qui était précisément, dans la pensée plus libre et plus étendue de la Reine, la ruine des princes eux-mêmes, et la ruine du Roi.

Le Roi ! la Reine ne voit que lui pour le salut. Elle le met en avant toujours, et seul, non tant pour les intérêts personnels du Roi que pour la garde et la dignité de la royauté. La crainte d’un amoindrissement du Roi est la crainte permanente de Marie-Antoinette, et, parmi tant d’inquiétudes, celle de ses inquiétudes qui ne cesse de veiller. Elle n’est préoccupée que de sauver le Roi de la reconnaissance d’une délivrance, que de sauver d’une servitude l’avenir de la monarchie. La déclaration d’une

  1. Lettre à Mme de Raigecourt. Éloge de Madame Élisabeth, par Ferrand.