Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/296

Cette page n’a pas encore été corrigée

Il est deux heures du matin. M. de la Fayette a répondu de son armée pour la nuit. Le Roi a renvoyé les gardes du corps à Rambouillet. Il ne reste au château que les gardes de service. La Reine se couche et s’endort. Elle a ordonné à ses deux femmes de se mettre au lit ; mais, sorties de la chambre, celles-ci appellent leurs femmes de chambre, et les quatre femmes demeurent assises contre la porte de la chambre à coucher de la Reine. Au petit jour, des coups de fusil, des cris d’hommes qu’on égorge montent jusqu’à elles. L’une des dames entre aussitôt chez la Reine pour la faire lever ; l’autre court vers le bruit : elle ouvre la porte de l’antichambre, donnant dans la grand’salle des gardes : Madame, sauvez la Reine ! crie, en tournant vers elle son visage ensanglanté, un garde du corps qui barre la porte avec son fusil, et arrête les piques avec son corps. À ce cri, la femme, abandonnant ce héros à son devoir, ferme la porte sur M. Miomandre de Sainte-Marie, pousse le grand verrou, vole à la chambre de la Reine : « Sortez du lit, Madame ! ne vous habillez pas : sauvez-vous chez le Roi ! » La Reine saute à bas du lit. Les deux femmes lui passent un jupon sans le nouer. Elles l’entraînent par l’étroit et long balcon qui borde les fenêtres des appartements intérieurs ; elles arrivent à la porte du cabinet de toilette de la Reine. Cette porte n’est jamais fermée que du côté de la Reine. Elle est fermée de l’autre côté ! et les cris et le bruit approchent : Miomandre est tombé à côté de son camarade du Repaire, qui est venu partager sa