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allait quitter le château, madame de Polignac recevait ce mot de la Reine : Adieu, la plus tendre des amies ! Que ce mot est affreux ! mais il est nécessaire. Adieu ! je n’ai que la force de vous embrasser[1]. Et madame de Polignac partait, emportant pour M. Necker la lettre qui le rappelait au ministère, la lettre où Louis XVI lui demandait de revenir prendre sa place auprès de lui, « comme la plus grande preuve d’attachement qu’il pouvait lui donner. »

Toute la pensée de la Reine appartient aux fugitifs, à leur voyage, à leur fuite, à leur salut :

« Un petit mot seulement, mon cher cœur, je ne peu résister au plesir de vous embrasser encore. Je vous ai écrit, il y a trois jours, par M. de M…, qui me fait voir toutes vos lettres et avec qui je ne cesse de parler de vous. Si vous saviez avec quelle anxiété nous vous avons suivie et quel joie nous avons éprouvé en vous sachant en sûreté ; cette fois je ne vous ai donc pas porté malheur. On est tranquille depuis que je vous ai écrit, mais en vérité tout est bien sinistre. Je me console en embrassant mes enfants, en pensant à vous, mon cher cœur[2]. »

La Reine court au-devant des nouvelles de son amie, que lui apporte le baron de Staël ; elle ne se lasse point de lui écrire, et, lui écrivant, elle croit lui parler encore.

  1. Mémoires sur la vie et le caractère de madame la duchesse de Polignac, par la comtesse Diane de Polignac. Hambourg, 1796.
  2. Lettre autographe communiquée par M. Chambry, et publiée pour la première fois par nous.