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oublis de madame de Polignac sur ce point étaient allés si loin que, quatre ans avant la Révolution, en 1785, la Reine, avant d’aller chez madame de Polignac, envoyait toujours un de ses valets de chambre s’informer des noms des personnes présentes ; et il n’était pas rare que la Reine s’abstint d’après la réponse. La Reine s’étant hasardée une fois à parler à madame de Polignac du peu de plaisir qu’elle avait à trouver chez elle certaines figures, madame de Polignac, sortant de sa douceur, osait répondre à la Reine : « Je pense que parce que Votre Majesté veut bien venir dans mon salon, ce n’est pas une raison pour qu’elle prétende en exclure mes amis. » — Je n’en veux pas pour cela à madame de Polignac, disait plus tard la Reine en rapportant cette réponse, dans le fond elle est bonne, et elle m’aime ; mais ses alentours l’ont subjuguée[1].

C’est alors que la Reine avait pris peu à peu ses habitudes dans le salon de la comtesse d’Ossun, sa dame d’atours, sœur du duc de Grammont, nièce du duc de Choiseul. Madame d’Ossun n’avait rien de brillant dans l’esprit ni dans les manières, mais elle était une personne parfaitement vertueuse et parfaitement douce, sans intrigues, sans exigences, ne demandant rien ni pour elle ni pour les siens, occupée seulement de plaire à la Reine, empressée bientôt à se dévouer pour elle, et dénoncée aux vengeances de la Révolution par l’Orateur du peuple.

  1. Correspondance entre le comte de Mirabeau et le comte de la Marck. Introduction.