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juste d’un contemporain, qu’en héritant d’un pareil amour, Marie-Antoinette avait aussi hérité des haines et des ennemis d’une maîtresse de Roi[1]. La malveillance publique, qui avait si longtemps consolé les reines de France des infidélités de leurs époux, s’était attaquée à l’épouse dont le règne succédaient à l’influence des Pompadour et des du Barry. Cependant, si dans ce ménage de deux esprits dissemblables, la volonté et le caractère l’avaient emporté, si Louis XVI s’était soumis, s’il recourait aux conseils de la Reine, c’était avec le secret dépit et la défiance préconçue des natures faibles, qui ne veulent que se débarrasser de la responsabilité de l’insuccès. Il abandonnait les idées de la Reine, puis y revenait brusquement et paraissait y retomber. À peine s’était-il confié, qu’il se reprenait encore. C’étaient à tout moment des arrêts, des retours, des inerties qui défaisaient en lui les résolutions de la Reine. Ainsi la faiblesse même de Louis XVI le faisait incapable d’obéir et le dérobait à la soumission, sans que son cœur, aujourd’hui tout entier à la Reine, eût jamais part à son humeur.

Seule, parmi les femmes de sa famille, Madame Élisabeth, libre des inimitiés qui avaient entouré son enfance, échappant à son éducation et suivant sa belle âme, montrait son amitié, par son dévouement à la femme de son frère, la facile victoire de tant de grâces, quand elles ne rencontraient

  1. Mémoires de Rivarol. Beaudoin, 1824.