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guerre sa probité, ses talents, un corps presque sans bras et tout glorieux de blessures[1]. L’introduction au conseil de M. de Castries et de M. de Ségur, l’importance nouvelle de la Reine, semblaient ramener le ministère tout entier à des dispositions meilleures et à des expressions plus soumises envers elle. Un rapprochement, une alliance contre M. de Maurepas s’était faite entre la reine et M. Necker, à l’occasion de la nomination de M. de Castries, surprise et précipitée par M. Necker en l’absence de M. de Maurepas[2]. M. Necker persuadait bientôt à la Reine ce que sa popularité persuadait alors à la France : qu’il était une sorte de providence et un homme à peu près indispensable au bien de l’État ; et la Reine se laissait aller à croire à M. Necker, comme y croyaient, à l’exception de madame de Polignac, toutes les femmes de la cour dont Carraccioli donne la liste à d’Alembert, « l’impérieuse et dominante duchesse de Gramont, la superbe comtesse de Brionne, la princesse de Beauvau à l’esprit séduisant, l’idolâtrée comtesse de Châlons, la merveilleuse princesse d’Hénin, la svelte comtesse Simiane, la piquante marquise de Coigny, la douce princesse de Poix[3]. » Conquise comme toutes celles-là, la Reine en venait à oublier les réformes de M. Necker. Elle le maintenait et le retenait en place, l’engageant à ne pas donner sa démission, et voulant qu’il patientât jusqu’à la mort de

  1. Mémoires historiques, par Soulavie, vol. IV.
  2. Mémoires, par l’abbé Georgel.
  3. Mémoires de la République des lettres, vol. XVII.