banqueroute[1]. Si son orgueil de souveraine souffrait de ces retranchements et de ces bruits publics qui, en appelant et en annonçant d’autres, tantôt la réduisaient à quatre femmes de chambre, tantôt voulaient en faire une bourgeoise de la rue Saint-Denis avec les clefs de sa cave à sa ceinture, sa bienfaisance n’en était pas moins blessée. Toutes ces grandes et belles vertus d’intérieur laissées dans l’ombre et méconnues en elle, cette sollicitude infatigable, cette humeur pardonnante, cette charité exercée à tout moment autour d’elle, avaient attaché la Reine à sa maison comme à une famille. Faut-il rappeler ces domestiques blessés, et dont la Reine étanchait elle-même le sang[2], ces femmes si vite rappelées après une brusquerie, et si vite rentrées en grâce[3], ces majors des gardes grondés avec un mot, amnistiés avec un sourire[4] ? Puis, au-dessus de ces oublis de la grandeur et de la sévérité, ces jeunes filles élevées dans l’amitié maternelle de la Reine[5], et dont la Reine s’informera, même prisonnière au Temple, ces jeunes filles dont la Reine gardait l’innocence avec de tels soucis, qu’elle lisait le matin les pièces du soir[6], pour savoir si elle devait leur permettre le spectacle ; ces pages, grandis sous sa tutelle, comme sous le regard
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